mercredi, juin 28, 2006

Le TIKKO


Un peu de matière sur ce mouvement

Une brochure en français distribuée aux militants en France

Rions un peu avec un extrait illustrant mes allusions aux schismes réguliers

Le TKP-ML se reforme très vite et développe la guerre populaire avec TIKKO. En 1987 un groupe sort du TKP-ML en raison de la ligne opportuniste du comité central du parti, et forme le TKP-ML/TIKKO DABK (comité pour l’Anatolie orientale), tandis que coexiste à côté le TKP-ML menant une conférence critiquant le comité central, ouvrant ainsi la voie de la réunification qui a lieu en 1992.

Mais en 1994 un grave problème de démocratie interne conduit à la rupture entre un parti divisé en deux fractions, qui forment alors le TKP(ML)-TIKKO et le TKP/ML-TIKKO. S’il n’y a pas de différences idéologiques, la vie à l’intérieur du parti est conçue très différemment.

Les militants du TKP(ML) reproche le fait que de très graves " erreurs " de hauts responsables aient été caché et qu’ainsi une atteinte majeure au marxisme-léninisme ait été faite.

[A la fin 1999, le TKP(ML) a officiellement changé de position par rapport au TKP-ML. Si au début la critique faite se définissait comme "déviation mafieuse" puis comme "déviation pragmatiste-machiavéliste", désormais le comité central du TKP(ML) a appelé à l'union des deux partis et demande aux militants de considérer le TKP-ML comme révolutionnaire, marxiste-léniniste.
Cette position est pour nous révisionniste; elle s'accompagne d'une remise en cause de l'action du quatrième secrétaire général du TKP(ML), Cüneyt Kahraman, désormais qualifiée de "gauchiste" par la direction du TKP(ML).- Note de Front Social]

[La transformation du TKP(ML) en MKP a été un pas en avant dans cette liquidation de la tradition du TKP(ML).

La direction du TKP(ML) puis du MKP n'a cessé d'appeler à l'unification alors que le TKP/ML a continuellement attaqué le TKP(ML). - Note du PC(MLM)].

Lisez ca une fois, et faites moi un résumé synthétique!

Le fond idéologique est le même que celui des mouvement de guérilla maoïstes classiques observés en Chine bien sur, au Pérou, au Népal. L'idée d'un "encerclement des villes par les campagnes" et de la création des "zones libérées", bases de départ de la conquête du pays a parfois été couronnée de succès. La théorie militaire d'Öcalan s'appuyait d'ailleurs sur les mêmes principes, mais la stratégie de la terre brûlée de l'armée turque et sa supériorité logistique a contré la bonne connaissance du terrain, le courage et l'endurance des guérilléros kurdes...Les seules "zones libérées" par le PKK l'ont été dans le Dersim et autour du mont Cudi près de la frontière Irakienne. Le mont Cudi est aujourd'hui une surface noire et pelée, totalement rasée au Napalm...

Ce genre de mouvements ne peuvent survivre face à une armée conventionnelle disposant d'hélicoptères de combat et de transport de troupes... et ne disposant pas d'une base populaire suffisamment forte. La gauche armée turque est toujours restée à l'état groupusculaire, sans jamais parvenir à recruter autant que le PKK... ce qui n'a pas empêché de nombreux jeunes militants "idéalistes" de perdre leur vie dans les montagnes ou dans les prisons turques...

On est même pas tranquille chez soi

Trouver de la matière pour mon blog dans "Le télégramme de Brest et de l'Ouest", franchement, j'aurais pas cru...et pourtant!


Six turcs soupçonnés d'appartenir au TKPML,parti communiste turc marxiste léniniste, scission armée maoïste et kurde du TKP légal, fondée par Ibrahim Kaypakkaya en 1972 (ouais faut suivre!) ont été arrêtées à Paris et à LANDIVISIAU (finistère) pour recrutement et "financement du terrorisme d'extrême gauche turc", par extorsion de fond ou "impôt révolutionnaire" dans la communauté kurde de Paris.... Ils avaient notamment enlevé en 2005 un homme travaillant dans le Senter à Paris, pour le relacher après avoir volé sa voiture de luxe. L'homme arrêté à Landivisiau était commerçant...

Le TKP-ML s'illustre par son grand courage idéologique, soutenant en vrac les Maoïstes népalais (primés par toutes les organisations de droit de l'homme et les nombreux réfugiés Népalais fuyant leur "guerre du peuple") et le Sentier Lumineux Péruvien. Il faudrait peut etre les prévenir que celui ci fait grise mine depuis l'arrestation en 1992 de son chef Abigaël Guzman. Ce parti était connu pour masscrer les paysans des villages conquis à coup de marteau (pas de faucille signalée) notamment 240 d'un coup le 28 janvier 1989.

Si je comprends bien (plongez vous dans l'organigramme des groupes d'extrême gauche turcs, et vous verrez!!!), la branche armée du TKP-ML était le TIKKO, mouvement de tendance alévie, maoïste et paysan (logique), surtout présent dans le Dersim (région kurde de tunceli) mais plus ou moins décapité par l'armée turque au début des années 2000...Ses derniers membres, retranchés dans les montagnes se font sporadiquement massacrer par l'armée...

Bref des gens charmants...dont les militants arrêtés sont systématiquement enfermés en prisons de type-F (les plus dures) et ont lancé des grèves de la fin qui ont fait près de 200 victimes à ce jour...

L'extrême gauche turque constitue une réelle anomalie en Europe, où aucun équivalent sérieux n'existe. Pronant "le renversement de l'ordre constitutionnel par les armes", de nombreux partis ont pullulé dans les années 60, prompt à s'entre-excommunier pour titisme ou droitisme et autres "trahison petit bourgeoises". Ils paraîtraient presque amusants si ils n'avaient pas accompagnés leurs gesticulations d'actions armées, d'assassinats ciblées et autre "guerilla urbain" contre les milices d'extrême droite, qui ont conduit au coup d'Etat militaire de 1980... censé mettre fin aux violences, ce coup d'Etat a essentiellement mis l'extrême droit au pouvoir, l'associant à la sale guerre au Kurdistan commençant en 1984...

De nombreux militants "solcu" ou "devrimci" (gauchiste, révolutionnaire) ont essaimé en Europe après le putsch militaire, notamment en Allemagne, en Belgique et en France...


Le bâton pour se faire battre

Aysel Tugluk, "co présidente" du DTP, en d'autres termes la chienne de garde d'Öcalan au sein du parti pro-kurde, a brillé par son intelligence lors d'une réponse à l'ambassadeur de l'UE qui enjoignait les politiciens kurdes à se distancier du PKK


"Il n'est pas possible de mettre une distance entre nous et le PKK".

Amusant tout de même! A tous ceux qui placent leurs espoirs dans l'émergence d'un parti démocratique sans lien avec le PKK et enfin intégré dans le jeu politique turc, la Madame indique que elle vivante, jamais.

La convention du DTP à Ankara (tous les partis doivent avoir leur siège dans la capitale) a été marquée par le nombre de portrait d'öcalan affichés...après le drapeau du PKK déployé lors du fameux meeting du HADEP au cours duquel Murat Bozlak avait été arrêté, il est clair que les vieilles recettes marchent toujours. D'après "Hurriyet" les gardes placés aux portes étaient habillés en guérilléros. La quand meme, ca sent l'intox, et on y croit pas une seconde.

Voici une lettre envoyée à la représentation de la commission européenne à Ankara, signée par la fondation kurde pour la recherche et la culture (Kurt-KAV) à Istanbul, le parti pour la liberté et les droits (HAK-PAR), la société pour l'art et la culture (Cira) de Diyarbakir, et d'autres organisation culturelles de Van, Diyarbakir ou Istanbul

Le dernière partie de cette lettre liste les demandes des Kurdes

1) All legal and illegal barriers to Kurdish culture, art, music and literature should be abolished.

2) Kurdish language, first of all in the field of education, should be approved for use in all areas of life, from primary school to university. Kurdish language should be supported as a language of education, and the state should allocate money from the budget for that.

3) First of all, the primary school curriculum, as well that of the rest of the educational sector, should be revised and assimilationist and racist elements which are based on policies of refusal and denial should be excluded.

4) All laws and regulations which impede the use of Kurdish and other national and local languages on TV and radio should be abolished.

5) The names of more than 10,000 residential areas, such as cities, and towns and geographic zones/areas (mountains, lakes, plains etc.) should go back to the original (be it Kurdish, Armenian or Assyrian).

6) The necessary legal reforms need to be made to the right to assemble for not only for Kurds but also for everybody; all legal prohibitions on the right to gather should be abolished, and that right should be guaranteed under the Constitution.

7) Taking into account the multi-ethnicity of Turkey, the Political Parties Law and all other anti-democratic and oppressive laws should be revised and amended.

8) The Alevis and other religious minorities should have the right to express their culture and beliefs, and legal impediments to this should be abolished.

9) All barriers to freedom of thought should be abolished, and freedom of thought shouldn't be a crime.

10) Efforts need to be made to reestablish social peace.

11) The Constitution and the law should be amended to facilitate the development of a pluralistic, democratic and egalitarian society.


Difficile de voir quoique ce soit de "terroriste" dans cette demande, mais avec un effort d'imagination on peut imaginer que redonner aux villes Kurdes leur nom original (ou pas! Diyarbakir est Amed en kurde, mais a bien été fondée comme Diyarbakir par les Arabes!) est une atteinte à l'intégrité de la république... Quand on voit les réactions de certains tétards en France contre le double affichage en Bretagne! Tenez d'ailleurs pourquoi ne pas donner cette idée au Kurdes... plutot que de rebaptiser toutes les villes du Kurdistan, ils pourraient afficher les deux noms...Un beau symbole...

Notons que la libération du Soleil de l'Humanité ne semble pas préoccuper outre mesure ceux qui se battent contre l'assimilation des Kurdes de Turquie. Etonnant non?


mardi, juin 20, 2006

Censure internet

Suite à une discussion sur un formum kurde impliquant un certain nombre de photos de jolies kurdes (en tout bien tout honneur) un des utilisateurs désespéré nous a copié collé le message que son fournisseur d'accès lui envoyait.

We appologize the site we are attempting to visit has been blocked due to its content being inconsistent with the religious, cultural, political and moral values of the United Arab Emirates




Rappelons que les EAU sont censés être un des Etats Arabes les plus progressites... toute partiellement démocratique qu'elle soit, la Turquie n'exerce pas de véritable "censure" sur internet. Un contrôle certainement, mais les sites contestataires sont accessibles sans filtre... tout comme les sites pornos si j'en crois la page de garde d'un ordi d'un café internet de Cizre à la frontière irakienne (berk d'ailleurs). Dire que ces grands enfants rougissent comme des nonnes au moindre regard féminin appuyé...

Öcalan / Besikçi, suite

Visiblement Kurdishmedia n'a pas du tout apprécié de se faire agonir par les supporters d'Öcalan pour avoir "fait de la propagande anti-pkk". Il est vrai que c'est le seul site kurde anglophone a publier des articles dénonçant les méthodes du PKK, ce qui doit déplaire à beaucoup. La réponse, signée Berfo Serhedi, livre des extraits des fameux "entretiens" qu'Öcalan a avec ses avocats à Imrali, et les donne comme extraits du site d'extrême gauche Koxuz
"I read in a newspaper that Ismail Besicki says that Ocalan is under the control of the state so he can not decide freely or for this reason let the people outside speak. He even said that Ocalan made an agreement with the state and started the war.This is an attack to me. Lie, lie and lie. How can he say such things? I am being insulted with these words. I need to defend myself against such attacks. This is in fact an attack against the Turkish state as well. "

Kurdish nationalism is very dangerous. It is a big lie that I made an agreement with the state and started the war. By saying such things, Besikci is making cheap Kurdish nationalism. There are some states behind him. The head of those who want to use Kurdish nationalism is outside of Turkey.

Attaque (à peine) voilée contre Barzani, contre lequel Öcalan vitupère depuis qu'il sait qu'il commence à être plus populaire que lui même au Kurdistan Turc... Le fait que Barzani soit le premier président élu d'une entité kurde (alors que lui est unanimement désigné) ne doit pas arranger les choses.

Some circles are trying to bring primitive (Kurdish) nationalism and chauvinistic (Turkish) nationalism against each other.

C'est vrai qu'il ne l'aime pas le nationalisme kurde... il semble le mettre sur un rang inférieur au nationalisme turc, qui n'a pourtant rien à envier à personne sur le plan primitif.

Question: What is the situation in East (of Turkey)? You stood against the “Democratic Republic Thesis” which Ocalan started to defend after being captured. You believe that the Imrali thesis is a setback…

Suggestions about the Kurdish issue should be brought up by the people outside, not by Imrali! There are political parties like DTP and many other groups and they should decide what kind of policies to follow for the Kurdish issue.

Voila les extraits de l'interview de Ismayil Besikçi dans Milliyet...

Q: After having been captured, Ocalan changed his thoughts and his era is over now. Is this what you think?

He is in the hands of the state. He is under the state’s control.

Q: Isn’t he able to speak freely?

He has spoken and now there is a price to pay. I know this from my own experience; while I was in prison in 1985, I wrote a letter about the Kurdish question to a friend of mine. They returned that mail back to me and told me ‘you are committing a crime in the prison. We are going to start a disciplinary procedure.” This is the situation for even a simple thing about the Kurds. Yet, on the other hand, Ocalan is ‘declaring a war’. He says in his orders that “the state did not take any steps, so use the arms again.” How can one say such things in that condition? It clearly means that the state has such demands.

Que rajouter à celà! C'est l'évidence même...la question est de savoir si Öcalan SAIT qu'il est manipulé. Rien n'est moins sur! L'intégralité de l'interview d'Ismail Besikçi sur ce lien

http://www.kurdmedia.com/articles.asp?id=12672


et en français ici http://ofk2.blogspot.com/2006/06/besiki-et-calan-rien-ne-va-plus.html

Eh oui, certaines ont moins la flemme que certains...



Ce qui est foncièrement rigolo, c'est que Besikçi n'est pas kurde mais est bien plus nationaliste qu'Öcalan. Ce qui l'est moins c'est d'observer l'attitude des jeunes kurdes en Turquie. Beaucoup sont encore persuadés qu'Öcalan est l'avenir des Kurdes. Si on leur oppose les déclarations qu'il a pu faire depuis son arrestation, ils rétorquent qu'il a été torturé, drogué, qu'il ne peut pas parler librement. Si on leur demande pourquoi alors ils l'écoutent toujours, ils répondent qu'Öcalan est leur vie, que sa santé est leur santé... L'argument "avant le PKK les kurdes ne savaient pas qu'ils étaient kurdes" ne tient pas une seconde devant l'histoire, et le fait qu'Öcalan insulte les kurdes à longueur de page (et ce dès AVANT son arrestation) en les traitants d'ânes et de primitifs n'a pas l'air d'entamer leur amour filial...Quel mouvement de libération a déjà vu son chef insulter son propre nationalisme?

Ma théorie la dessus, c'est qu'Öcalan se croit supérieur au concept même de Kurdistan. Il jalouse l'amour des Kurdes pour leur pays rêvé, et voit le concept de Kurdistan comme un rival gênant dans son ascension au rang de soleil de l'humanité. Que croyez vous que représente le soleil sur le drapeau du PKK...un rappel à celui du drapeau kurde officiel? A voir...

Besikçi admet honnêtement avoir supporté le PKK, et a d'ailleurs fait de la prison pour ça. Il a critiqué en son temps les "traîtres", les fugitifs. Il appelle aujourd'hui a ne plus écouter "Imrali" et à suivre les partis pacifistes comme le DTP, ou à se rapprocher des partis kurdes irakiens...

Les Kurdes seraient bien inspiré d'écouter quelqu'un qui a consacré sa vie à faire entendre leurs voix en Turquie, et laisser dans l'oubli un vieux bonhomme aigri et paranoïaque qui après avoir vendu le rêve kurde pour racheter sa vie s'évertue à le piétiner, probablement aux ordres du MIT...

jeudi, juin 15, 2006

Öcalan, grand défenseur de la turquitude

Je m'étais promis de ne plus casser du sucre sur le dos du PKK et de son leader solaire Abdullah Öcalan...

Mais que voulez vous, l'actualité me rattrape! Ce cher Apo, du fond de son oubliette d'Imrali a demandé à ses avocats de déposer une plainte contre le sociologue turc Ismayil Besikçi pour attaque contre l'Etat Turc...

Le seul problème, c'est qu'Ismayil Besikçi a consacré sa vie à défendre le peuple Kurde. Sa thèse de sociologie en 1967 portait sur le changement social dans les tribus kurdes d'anatolie orientale.. Il a passé 14 ans en prison à diverses reprises, recidivant à chaque libération par un nouvel ouvrage ou article sur les Kurdes. Besikçi s'est battu depuis les années 60 contre l'absurdité de l'idéologie officielle, celle qui niait et nie encore parfois la simple réalité. Celle qui faisait de la langue kurde un patois composite de turc, de persan et d'arabe, des Kurdes des "turcs des montagnes", du turc la "langue du soleil", mère des autres langues. Celle qui imposait aux sciences sociales une frontière entre "ce qu'on peut dire" et "ce qu'on ne peut pas dire"...

A la différence d'Öcalan, Besikçi, sans rien de commun avec le peuple kurde, n'a jamais renoncé à ses idées, ne s'est jamais compromis et a toujours lutté avec entêtement contre le mur de bêtise et de négationnisme élevé devant lui.

Voir aujourd'hui Abdullah- "Annem Türktür"- Öcalan l'attaquer pour "insulte à l'Etat turc" serait presque cocasse...mais tellement énorme que je ne peux m'empêcher de soupçonner une manipulation du MIT...

Plus à venir sur Ismayil Besikçi si je trouve le temps...


mercredi, juin 14, 2006

Pendant la coupe du monde, la guerre des images continue

Pauvres Turcs! Déja éliminés de la coupe du monde en barrage contre la Suisse dans des conditions assez pitoyables (victoire 4 à 2 à Istanbul, insuffisante après le 2 à 0 encaissé à l'aller, tabassage de joueurs suisse dans les couloirs...), ils doivent regarder d'un oeil maussade cette coupe du monde allemande.


Seulement voila, toujours prévoyant, les Kurdes leur donnent une bonne occasion de bondir...





Vous aurez reconnu en Rouge Blanc Vert avec un beau soleil, le drapeau du Kurdistan, reconnu par tous les Kurdes à l'exception du PKK (dont le drapeau n'est pas laid à vrai dire, mais possède l'inconvénient de changer tous les 2 ans)

Dans la morosité du match des Bleus contre la Suisse, j'ai réussi à noter derrière le but français en première mi-temps un beau Gwenn Ha Du bien en évidence derrière Barthez...

UMP, MHP, même combat?

Splendide article de Martin Winckler dans Libération, rubrique "rebonds", réaction à une déclaration révélatrice de Sarkozy sur la régularisation des sans-papiers et de leurs enfants... D'après Sarkozy, un "gage d'intégration" c'est le fait de "n'avoir aucun lien avec le pays d'origine" et donc ne parlent plus leur langue maternelle...

Une problématique "intégration = assimilation" dans la grande tradition jacobine française: on ne peut être français en ayant une autre langue maternelle...arracher un enfant à sa culture, c'est en faire un français. Comment comprendre l'opposition de Sarkozy à la Turquie républicaine??? Ce modèle autiste, négationniste et délétère pour la "diversité culturelle" (concept signifiant en France qu'il faut que le français et non l'anglais domine le monde, et non une idée archaïque de défense des langues minoritaires vecteur du fascisme identitaire)

Voila quelques extraits de cet article...

Tertio : «La langue du pays d'origine» ­ c'est sur ce point que la «pensée» de Nicolas Sarkozy est la plus claire. Faire de la méconnaissance de la langue du pays d'origine (ou l'«absence de tout lien avec le pays d'origine») par les enfants nés en France une condition à la régularisation des familles, ce n'est pas seulement monstrueux, c'est aussi d'une grande perversité.

Car tout enfant d'immigrant entend ses parents parler leur langue d'origine, la comprend, et la parle lui aussi. Même s'il apprend à l'école la langue du pays d'accueil. Il ne peut pas en être autrement à moins d'interdire aux parents de parler leur langue maternelle devant leurs enfants, et de ne s'adresser à eux que dans une langue d'accueil qu'ils maîtrisent le plus souvent très mal. Et ce serait d'autant plus stupide de le faire que les enfants sont souvent en eux-mêmes le principal vecteur d'intégration des parents : parlant les deux langues ils deviennent «les interprètes» de leurs parents.

Question : si un citoyen venu d'un pays anglophone demandait l'asile politique en France en raison de persécutions exercées sur lui par le gouvernement Bush, préciserait-on comme condition que ses enfants ne parlent jamais l'anglais ? Leur interdirait-on de prendre l'anglais comme première langue dans un collège ou un lycée républicain ? Et si un enfant de réfugié chinois né en France décide d'étudier le chinois au lycée, va-t-on l'empêcher de le faire ? Jusqu'à quel âge ces enfants seront-ils privés de tout contact avec leur pays ou leur culture d'origine ? Et dans la mesure où leur premier lien avec cette culture, cette langue, ce pays est représenté par leurs parents, Monsieur Sarkozy veut-il dire que les enfants pourraient être gardés en France, mais que, pour bien faire, les parents en seraient, eux, expulsés ?

Interdire à quelqu'un de parler sa langue ou la langue de ses parents, c'est cruel et c'est barbare. Faire de l'ignorance (ou du mensonge) une condition d'intégration, c'est pervers et monstrueux. Et, en pratique, ce n'est pas seulement monstrueux, barbare et pervers. C'est aussi très, très con. Il est impossible qu'un enfant ignore ses origines culturelles ­ la langue d'origine en est non seulement le coeur mais aussi le vecteur. Et on peut se demander si Nicolas Sarkozy, qui n'hésite jamais à rappeler qu'il est lui-même issu d'une famille d'immigrés, ignore tout de la langue de ses ancêtres. En tout cas, le langage politique du ministre de l'Intérieur n'a rien de maternel. Ce n'est pas un langage, d'ailleurs. Un langage, c'est un outil de communication, d'échange, de partage, d'intelligence.

Quatre mots totalement... «étrangers» à Nicolas Sarkozy.


Bref, je bois du petit lait dès le petit-dèj...:o)



lundi, juin 12, 2006

Réflexions kurdo-bretonnes

Réaction d'une lectrice fidèle...


D'abord en ce qui concerne les Bretons, tout à fait d'accord avec l'adhésion à des valeurs nationales communes surtout celle très française d'égalité. Le principal vecteur de cette égalité étant l'école et son rôle d'élévateur social. La Bretagne grâce à sa concurrence public/ privé bien de chez elle, bénéficie en effet depuis longtemps du maillage scolaire le plus dense de France. Résultat, la région des "petites bonnes bretonnes", restée longtemps pauvre, rurale et considérée comme "arriérée" (ça rappelle ailleurs?) compte le taux d'agrégés et de fonctionnaires - républicains "par essence"- le plus important de France.

C'est aussi au nom de cet idéal égalitaire que l'école a éradiqué la langue, cause de l’arriération de ces petits bretons. Tàche d'autant plus aisée, qu’au début du siècle il n'était pas parlé par la petite bourgeoisie de la Bretagne bretonnante. C'était la langue du peuple, celle des paysans, des mousses, des petites bonnes etc.. Il était un peu méprisable, donc ….

Mes grands-mères, plutôt bourgeoises se contentaient de le comprendre un peu. Connaissance acquise au contact des "petites paysannes" et des bonnes de la maison pour l'une, des mousses qui jouaient aux cartes au sémaphore de la pointe du Raz dont son père était le gardien pour l'autre. Seul un de mes grands-pères le parlait parfaitement. Il a appris le français à l'école primaire "assimilationniste". Et toute sa vie il a voué un culte aux instituteurs qui lui avaient permis d'entrer comme boursier (c'était alors au mérite) au lycée de Quimper où les gosses de bourgeois regardaient de haut les boursiers bretonnants, qui se vengeaient bien en étant bien meilleurs qu'eux en français et en langues étrangères. Il était très fier de parler breton (petite revanche sociale sur la belle famille?) mais n'a jamais vu l'utilité de le transmettre à ses fils. Pourquoi faire? Je pense que des Kurdes comme mon grand-père, il y a du en avoir pas mal jusque dans les années 80.

Il est peut-être possible d'établir un parallèle avec ce "mépris" plus que racisme, dont les Kurdes font assez souvent l'objet à l'Ouest. Au moins jusque dans les années 90, le Kurde c'était surtout le type des montagnes, le nomade, le religieux, l'analphabète, le traditionnel, les asiret et les aghas, etc..bref, celui qui était à l'antithèse de la modernité (laïque, libératrice pour les femmes, lettrée, urbaine etc..). Du début de la République kémaliste jusque dans les années 80, il devait être méprisé par les urbains au même titre que les villageois, leurs dialectes et leurs femmes en pantalons bouffants qui désertaient leurs villages anatoliens pour travailler dans les villes. Je suppose qu'aux débuts de la République kémaliste, "l'autre " a du rester pendant un certain temps les chrétiens. Pas certaine, qu'on différenciait beaucoup le Kurde du nomade Turkmène à l'époque.

Le PKK a un peu changé la donne. Kurde connotant dorénavant "terroriste ", au moins en puissance. Mais surtout la guerre et les destructions de villages qui l'ont accompagnée ont entraîné l'arrivée en masse de réfugiés dans les grandes villes. Les vieux clichés ("le féodal" venu des montagnes) ont perduré. Le cinéma et le feuilleton TV s'en sont chargé. Or une migration "forcée" diffère de l'exode rural traditionnel par le fait entre autre que le migrant n'attende pas qu'un cousin lui ait déniché un job pour débarquer. Les réfugiés ont gonflé les rangs d'un nouveau sous prolétariat urbain , caractérisé par l' emploi précaire, la misère des familles, la perte brutale des repères villageois engendrant le développement de la petite délinquance, de la mendicité des enfants (parfois sous la coupe de "bandes organisées kurdes") etc...Beaucoup moins courant il y a une quinzaine d'années et alors l'apanage du milieu gitan. Ces nouvelles formes de délinquance urbaine attribuées aux Kurdes sont régulièrement stigmatisées par les médias, qui n'établissent pas le lien avec la guerre et les villages détruits, cette guerre restant une guerre non dite, qui n'a jamais existé. Ces gosses ne sont victimes que de leurs "mauvais parents" ou de "bandes mafieuses. Tout comme les émeutes urbaines de Diyarbakir n'étaient que le fruit de manipulations du PKK. Ce qui arrange tout le monde.

Bref, outre le féodal, coutumier du meurtre pour l'honneur, le Kurde est devenu aussi "la classe dangereuse", rejoignant les gitans et d'autres étrangers : mafias (russe ou kurde), prostitution (moldave) trafics en tous genre, eux aussi stigmatisés dans les médias. Ca rassure tout le monde, les mauvais, ce ne sont pas les Turcs. Ce sont les autres. Et la presse populaire, qui est aussi la plus réfractaire à toute reconnaissance de l'identité kurde, contribue pourtant à faire "un autre" du Kurde en propageant ces clichés.

Ce qui nous rappelle aussi d'autres "mauvais" bien de chez nous. Sous des formes un peu différentes, on retrouve le même mépris social pour l'ouvrier maghrébin et la même peur entretenue par les médias et la même récupération politique. Certes les Kurdes ne sont pas venus de l'extérieur eux, mais le Sud-Est du pays est resté un ailleurs lointain en Turquie, où on ne rend le plus souvent que contraint par une affectation de fonctionnaire rarement désirée, ou le temps du service militaire.

Quant à la classe moyenne éduquée, le syndicaliste, l'étudiant l' l'intellectuel ou l'artiste kurde, marxiste dans les années 70, pro-kurde aujourd'hui; ils n'ont jamais été méprisés, ni même rejetés, car ils étaient modernes dans les années 70 et aujourd'hui ils ne font pas peur. Je pense qu’ils sont moins devenus modernes "comme les Turcs" mais plutôt en même temps que les autres Turcs anatoliens ou les muhacirs venus de l'extérieur, en renonçant comme les autres à leurs particularismes, du moins en apparence....Car pour finir, le questionnement sur l'identité est loin de ne toucher que les Kurdes dans la société urbaine turque d'aujourd'hui.

Anne

dimanche, juin 11, 2006

Le dernier film de Yilmaz Güney: Duvar ("Le mur")

Tourné en 1983 en France, c'est donc le dernier film du réalisateur kurde de Turquie Yilmaz Güney, mort en septembre 1984 en exil. Il n'a pas eu le retentissement de "Yol" (la permission), palme d'or à Cannes en 1982, César du meilleur film étranger 1983.


Duvar décrit les conditions de vie dans un pénitencier turc à Ankara à l'automne 1981, 1 an après le coup d'Etat militaire du 12 septembre 1980 par Kenan Evren...celui qu'Alexandre Adler a récemment décrit comme un grand démocrate, ou quelque chose dans ce goût la...

Rien de spécialement "politique" ici: les personnages suivis sont des condamnés de droit commun, bien qu'on sache rarement pourquoi ils sont enfermés. Sans en faire des tonnes comme Midnight Express (où le héros est à tout prendre foncièrement antipathique), Duvar, tourné avec deux bouts de ficelle, choque bien plus, marque plus durablement...Il faut dire que Yilmaz Güney, enfermé 12 ans dans les prisons turques, et toujours en prison à l'époque ou "Yol" était tourné, sait de quoi il parle.

"Je n’ai pas voulu construire la copie conforme d’une prison donnée en Turquie. Il s’agissait plutôt d’une synthèse de toutes les prisons que j’ai connues. Il en a été de même de l’histoire. Bien que l’axe central en soit la révolte des enfants du dortoir 4 à la prison ouverte d’Ankara en 1976, les histoires individuelles parallèles proviennent de témoignages ou d’observations accumulées lors de mes séjours dans différents pénitenciers. (…) Cela a parfois été dur, voire douloureux, en tout cas sans complaisance. C’était la seule façon de rendre la réalité la plus sincère possible. (…) A nous de dire les réalités de la Turquie, pour faire en sorte qu’elles puissent enfin changer ; à eux d’interdire et d’emprisonner pour que rien ne change. Mais pour combien de temps encore ?… » (Yılmaz Güney)


Sadisme des gardiens (sauf "Ali Amca, qui tente de protéger "ses enfants" autant qu'il peut), sévices sexuels, délation, gangs, passages à tabac... Mutineries réprimées par l'armée, et mises en scène macabres (celle du mariage, mais je n'en dirai pas plus...)

Aucune note d'espoir, rien de positif dans ce film, un enfer morne dans le froid et la faim, où seule la révolte apparaît comme une solution de sortie, même si la fin du film semble montrer que cet espoir est vain...il reste que Yilmaz Güney parvient une nouvelle fois à faire ressortir la bonté humaine et ne peint pas un tableau monochrome de vicieux sadiques bestiaux comme c'est le cas dans Midnight Express..

Yilmaz Güney, enterré à Paris, sent toujours le souffre en Turquie, même si ses films circulent sans trop de problèmes...il peint pourtant la réalité de l'après coup d'Etat, la repression aveugle et la militarisation du pays, les pleins pouvoirs aux "petits chefs" hargneux etl'interdiction de toute contestation... un passé encore peu digéré sur lequel aucun droit d'inventaire n'a encore été fait... et la situation actuelle dans les prisons turques est peu susceptible d'avoir évolué.



samedi, juin 10, 2006

Les problèmes de l'investissement à l'Est

Il serait dommage que la réponse fleuve d'Ismail à mon précédent post reste enfouie dans l'anonymat des "commentaires"

La voila donc pour alimenter le débat, agrémentée de mes commentaires en italique

Je suis assez d'accord avec toi Tom mais j'ai deux remarques qui risquent de choquer, mais bon :

1/ Pour la comparaison avec les immigrés africains en France et leurs descendants, c'est vrai que comme tu l'avais fait remarquer, ce sont ds population "allogenes", mais dans le meme temps, pour les kurdes de Turquie, le choix de l'assimilation-integration est plus facile a faire (c'est un simple constat pas une recommendation).

Vois le nombre de ministres, d'hommes d'affaires (a l'ouest) et de haut fonctionnaires kurdes, ça n'a rien a voir a la situation en France ou on demande a ces populations de s'integrer culturellement SANS CONTREPARTİE ECONOMIQUE (a part le RMI)

Certes, mais les Kurdes "intégrés" sont des kurdes assimilés, qui ne mettent pas en avant leur identité kurde et se considèrent comme turcs, point. C'est une solution pour "pacifier" le pays, par pour répondre au désir de reconnaissance du peuple kurde... Evidemment en Turquie, un kurde qui accepte d'être turc et uniquement turc peut parfaitement réussir. Un député AKP qui avait inscrit "kurde" sur son CV dans la rubrique LANGUES ETRANGERES a provoqué un mini scandale au parlement. Quand le premier ministre Özal avait avoué que sa grand-mère était kurde, il s'est fait descendre par la presse de manière méprisante (du type "l'origine supposée da la grand mère de M. Özal ne doit pas remettre en question les fondements de la république, blablabla"... Quand Ibrahim Tatlises, demi-dieu national, a déclaré vouloir chanter AUSSI en kurde, sa langue maternelle, il a subit une campagne de presse meurtrière et des menaces des loups gris...et écoeuré s'est exilé en Allemagne pour quelques mois...
Ceux qui réussisent sont des Kurdes "turquifiés", et c'est exactement ce que préconise l'auteur de l'article, et ce que je critique.

Je veux pas continuer la comparaison, les arabes et les noirs sont pas en France depuis 3000ans etc ... c'était juste une remarque

Et tout à fait d'accord pour faire la distinction entre allogènes dans un cas et immigrés dans un autre...

2/ Les chiffres des investissement sont intéressant mais compare les avec une carte physique de la Turquie (qui comme ailleurs correspond souvent a la carte économique).
Les investissement sont réalisés sur (ou pres de) les grands axes de communication du commerce mondial, c'est a dire en comme partout dans le monde, avec un acces facile sur les ports de commerce (en l'occurence ici Istanbul, Mersin et Izmir).

En France aussi les investissement a Brive et a Mende doivent etre sensiblement differents que ceux fait a Nantes ou a Montpellier, mais on peut pas comparer vraiment vu la qualité des instructures et le PIB/PNB du pays. Le département de l'Ardeche a quand meme perdu la moitié de sa population dans la 2eme moitié du XXe siecle !

Imagine toi industriel a Van, le temps et le cout pour acheminer les marchandises depuis tes fournisseurs et reexpédier tes produit finis vers tes clients sont multipliés par 2,3 ou 4 !

Je dis peut être une connerie mais la facade mediterranéene n'est pas loin...Iskenderun, Adana, Ceyhan sont des ports industriels et peuvent servir de plate forme pour les produits kurdes...évidemment la configuration du territoir turc rend le transport routier peut rentable...

Meme avec des aides et des primes du gouvernement ou de l'UE (qui existent), un industriel prefere etre taxé a Adapazarı que non-taxé a Bitlis ! au final il est toujours gagnant.

C'est clair que c'est un vrai débat, et merci pour ce point de vue pragmatique!...après aider les kurdes à reconstruire leur agriculture et les laisser retourner dans les villages évacués constitue un début non? on en est pas là...

C'est comme avec les zones Franches en France. Le gars il vient en zone franche, il paye pas d'impot, mais vu qu'il se fait cambrioler 3-4 fois par an il est gagnant a s'installer ailleurs meme en payant des impots !

Les industriels kurdes EUX-MEMES n'effectuent aucun investissement dans l'Est, ils sont tous peinards a Istanbul et a Bursa ! Ah si, pour investir dans l'immobilier et relouer des apparts au prix du SMIC si la ils sont tres forts !

Très bon point :) Pareil en Bretagne, Pinault, Bolloré, Le Lay, n'en font pas des masses pour leur pays d'origine ;)

La Turquie est une économie de marché, je vois pas comment on va pouvoir résoudre le probleme. En l'absence de secteur privé, la majorité des salariés dans l'Est est employée par l'Etat, tout en compatissant a cette situation, je vois pas ce qu'ils peuvent faire de plus (si ce n'est moins de corruption,de gaspillage et de désorganisation, mais meme ça suffira pas a résoudre l'ensemble du probleme)

La disparité Est-Ouest n'est pas qu'une question d'économie de marché. Quand la Route goudronnée s'arrête à Malatya pour être remplacée par une piste, ca fait bizarre...bon c'était en 2003, mais ca m'avait marqué! Quand tu vois la tronche de la frontière Iraq-Turquie et le changement d'univers d'un Kurdistan à l'autre...d'un côté Mad Max, de l'autre la californie...je ne suis pas économiste donc je ne peux pas avoir un point de vue très élaboré, mais la disparité saute aux yeux. Les régions enclavées de France ne souffrent pas d'un différentiel de 1 à 100 par rapport à Paris!


vendredi, juin 09, 2006

La non-évolution de la question kurde en Turquie

A lire ce genre de délire je me rends compte que c'est le titre que j'aurais du donner à mon mémoire.

Rethinking The Kurdish Question in Turkey 6/7/2006 Turkish Press - By Fikret Bila

The Kurdish question has been around since the mid-1980s and will also remain in the coming years. This question has many dimensions. Turkey has won the armed struggle against terrorism. However, the times spent for the fight against terrorism haven’t helped a recovery in the fields of culture, the economy, politics and social life. The Kurdish question will have an important place in Turkey’s future. If Kurdish and Turkish nationalism are fomented against each other and the problem is spread to the social structure, then Turkey will have to make efforts on this question. This process can also bring irreversible results.

Our young people should do research on this issue and develop solutions for this problem. Mustafa Akyol, a young researcher, gave an example of this. In his book ’Rethinking the Kurdish Question: What Went Wrong and Where Will It Go?’ he treated the Kurdish question in a multidimensional way. His research is quite scholarly. The work, which makes use of national and international resources, handles the question in its regional framework.

Akyol bases his study on scientific resources and analyzed his findings from a liberal point of view. Akyol reaches the conclusion that approaches such as autonomy, a federation or independence can’t be seen as workable, permanent solutions. As a young researcher, Akyol sees the solution in integration. He gives advice on how to improve this. He sees democracy and Islam as a common point in solving this problem (in this respect, I think secularism should be highlighted more). Akyol suggests that Turkish identity should be seen as an upper identity and that a democratic, economic integration in a unitary structure would bring a solution. It is of great value that researchers, scholars and the young population are thinking about this problem.


Voila donc un "jeune chercheur" prometteur qui nous resert la même soupe qui mijote depuis 1980... comment régler la question kurde: en les intégrant. Limpide. Maintenant il faut rappeller que le mot intégration a le même sens en Turquie qu'en France: il est simplement synonyme d'assimilation forcée, de déni de la réalité, de refus de considérer le bilinguisme comme autre chose qu'une menace, une double identité comme autre chose qu'un séparatisme en puissance: intégrer les Kurdes à la Turquie, c'est en faire des Turcs, point.

Si l'on se refuse à envisager une autonomie ou une fédération, on envisage un même Etat unitaire et ultra-centralisé pour deux peuples sensiblement différents et séparés par un fossé d'incompréhension, de propagande et de préjugés tenaces. J'ai souvent pensé que si les Bretons s'étaient laissés assimiler aussi facilement (en l'espace d'une ou deux générations), c'est parce que la république offrait réellement un statut d'égalité et de progression sociale à ceux qui acceptaient de se considérer comme français et d'oublier leur identité première. En Turquie, tout renvoie le Kurde à sa condition, le lieu de naissance sur la carte d'identité est la garantie d'un contrôle policier plus que tendu, la couleur de peau est un stigmate difficilement effacable. Les Kurdes de Turquie sont les Arabes ou les Noirs de France: sensément égaux, mais discriminés dans les faits, qu'ils aient ou non un désir d'intégration. Tout les renvoie à leur statut de "citoyen de seconde zone", malgré les dénégations farouches des aveugles qui répètent comme une obssession "tous les citoyens sont égaux".

Un ami d'origine africaine s'est vu mettre à la porte d'une boîte d'intérim parce qu'il avait inscrit sur son CV qu'il faisait Science Po: "menteur". Özgür Un ami Kurde de la fac de Galatasaray s'est fait arrêter chez lui, convoyé en avion jusqu'à Diyarbakir, interrogé pendant deux jours (sans violences) et renvoyé à Istanbul. Un vague cousin s'était engagé dans la guérilla. Comment se considérer comme un citoyen comme les autres?

Le tissu social kurde a été en grande partie détruit par la république turque, dès sa fondation: des massacres et des déportations du Dersim dans les années 30 aux milliers de villages évacués à partir de 1987 (instauration de l'Etat d'Urgence), la société traditionnelle a été détruite, les ruraux forcés de coloniser les faubourgs des grandes villes, l'agriculture a été rendue impossible pendant près de 15 ans...la reconstruction du Kurdistan Turc n'a pas eu lieu, malgré 5 ans de paix relative entre 1999 et 2004: le "retour aux villages", programme officiel de l'Etat a été interdit de fait par des commandants militaires locaux ou des préfets récalcitrants, l'investissement de l'Etat n'a pas progressé

Highest investments:

1. Istanbul YTL 5.1 billion
2. Antalya YTL 2.2 billion
3. Tekirdag YTL 1.2 billion
4. Ankara YTL 1.1 billion
5. Izmir YTL 1 billion
6. Bursa YTL 826 million
7. Kahramanmaraş YTL 807 million
8. Gaziantep YTL 781 million
9. Kocaeli YTL 715 million
10. Kütahya YTL 603 million.
11. Konya YTL 527 million.
12. Muğla YTL 406 million
13. Balıkesir YTL 396 million
14. Manisa YTL 84 million
15. Düzce YTL 349 million
16. Eskişehir YTL 317 million
17. Adana YTL 301 million
18. Osmaniye YTL 293 million
19. Sakarya YTL 273 million
20. Zonguldak YTL 262 million
21. Afyon YTL 246 million
22. Hatay YTL 240 million

Lowest amount share in investments (in %)

(K) pour "Province à majorité kurde"

Bayburt and Iğdır [K](0.001 %)
Ardahan and Sinop (0.002 %)
Karabük, Bitlis (K), Muş [K]and Bingöl [K] (0.003 %)
Dersim [K] (0.004 %)
Ağrı [K]and Kilis (0.005 %)
Batman [K] (0.006 %)

(chiffres donnés par "The New Anatolian" pour 2005, cités par Vladimir)

Les fonds versé par l'UE pour le développement régional servent principalement aux provinces de l'Ouest de la Turquie, qui connaissent déja une prospérité sans commune mesure avec la "tiers mondisation" du Sud-Est Kurde...

C'est dans ce contexte que Mustafa Akyol parle d'intégration économique et démocratique... un discours que évolue peu par rapport au thème ultra rebattu "il n'y pas de question kurde, juste un problème de développement économique" sur lequel ont brodé tous les gouvernements de 1980 à 2002...la reconnaissance de l'existence d'une "question kurde" est aujourd'hui établie mais elle n'a permis aucun progrès signifcatif. La responsabilité du PKK est certaine, mais c'est l'appareil d'Etat qui a permis à cette organisation de regagner de l'influence, par une attitude autiste et bornée...


Les Chants du Pays de ma mère

Après "le temps de l'ivresse des chevaux" et "Les Tortues aussi peuvent voler" j'ai enfin pu voir cet autre film du réalisateur Kurde d'Iran Bahman Ghobadi. Le titre original est "Gomgashtei dar Aragh" ("Marooned in Irak) et me semble être en Iranien, mais l'essentiel du film est en Kurde Sorani.


Je suis desservi par des sous-titres minimalistes qui me font perdre une bonne partie du sens du film, mais pour l'essentiel voilà un résumé de l'intrigue: Mirza vieux musicien kurde iranien très connu, force ses deux fils Barat (chant, zurna et duduk) et Audeh ( chant et daf) à l'accompagner au Kurdistan Irakien à la recherche de son ex femme Haraneh qu'il sait en danger.


Le problème c'est que nous sommes en pleine guerre Iran-Irak, ce qui est rappelé par le bruit omniprésent des avions de chasse... La référence a des attaques chimiques de l'armée irakienne situe l'action en 1986-1987

Mirza est sec, droit comme un I, doté d'une magnifique moustache blanche immaculée, et n'hésite pas à flanquer des beignes énergiques à ses ingrats de fils.




Barat ne se dépare jamais de ses grosses lunettes noires ou de son masque de moto, et promène son bedon avantageux bien soutenu par son chalvar et sa ceinture traditionnelle (une bande d'étoffe de 10 mètres de long roulée autour du ventre) et est pour moi le personnage le plus profond.


Audeh est irrésistible, sorte de gros ours chevelu et moustachu, marié 7 fois et père de 11 filles, incapable de se donner un héritier mâle.




La première partie du film est franchement burlesque et se passe sous le soleil dans les montagnes du Kurdistan: l'ouverture se fait sur Barat chevauchant son side car. On ne comprend qu'après 5 minutes qu'il se trouve en fait sur la remorque d'un camion par peur des voleurs. Le personnage du médecin à grosses lunettes qui se réjouit de l'afflux de réfugiés parce qu'il peut leur refourguer sa camelote est franchement antipathique. Rassurez vous, il finit en caleçon dépouillé par des voleurs kurdes irakiens! A noter qu'il ressemble comme un fère à un autre docteur kurde iranien à la recherche d'un orphelin dans "Les tortues aussi peuvent voler" du même Bahman Ghobadi. (Vérification faite, c'est le même)



Autres scènes franchement poilantes en vrac, la douche du gros Audeh, arrosé à grands seaux par ses inombrables filles, le mariage annulé de force par un prétendant éconduit par le père de la fille...


(il faut dire qu'il a des arguments)

Le concert donné par les trois musiciens pour fêter l'annulation de ce mariage (enfin la j'avoue que les sous-titres ne permettent pas d'y entendre grand chose...), l'enterrement vivant de l'entremetteur (il s'en sortira) responsable du mariage...

J'ai eu une impression de déja vu lorsque 3 petits mioches viennent déranger Barat qui se soulage tranquillement la vessie...l'avantage de ces acteurs non proffessionels est qu'ils sont clairement aussi vrais que nature!!!



"comment peut-on faire pour avoir une aussi belle voix que toi oncle Barat??"

"Commencez par avaler un insecte!!!!"

La seconde partie se déroule à la frontière entre les deux Kurdistans...dans la neige et le froid, la bouillasse et la pluie, à l'image au final de tous les films de Bahman Ghobadi... clin d'oeil aux contrebandiers suvis dans "le temps de l'ivresse des chevaux", scène insoutenable de la découverte d'un charnier provoqué par la répression féroce de Saddam, douleur du vieux Mirza forcé de partir seul en Irak, son fils risquant d'être engagé de force...

Je ne dirai pas plus sur la fin du film, cela dévoilerait un peu trop...Sachez tout de même que Barat trouve un amour compliqué (bah oui, revoir son coup de foudre à la recherche de son frère dans un charnier ca n'augure rien de bon), et qu'Audeh découvre qu'au lieu de chercher une douzième épouse, il peut adopter sans frais deux orphelins kurdes irakiens doués pour le chant... (la scène est à pleurer!)


J'ai beaucoup ri en lisant un commentaire sur le jeu des acteurs sur le site www.imdb.com

Almost all the dialogue is delivered in a uniform monotonous shout. No one hardly ever lowers their voice to a conversational tone or a whisper. Whether this restricted range is due to the fact that Kurds actually speak this way or to amateurish acting, I don't know; but it wears on the nerves, dazes one with its constant din, and robs all dialogue of nuance and impact.

Réponse: oui oui, les Kurdes parlent vraiment comme ca, et oui oui, ca tape sur les nerfs à la longue!



lundi, juin 05, 2006

A l'Est rien de nouveau

Mes excuses pour cette absence prolongée, me voila de retour de Hongrie et en France pour quelques temps, avant ins allah et si le temps le permet de m'installer à Bruxelles...

A l'Est rien de nouveau donc. Enfin si, même si globalement la tendance reste la même...

Ce qui attire mon attention, au milieu de communiqués laconiques alimentant le décompte de PKK et de Soldats Turcs tués au Kurdistan Turc, c'est l'initiative osée voir suicidaire des ces trois Kurdes, dont deux (Ibrahim Guclu et Zeynel Abidin Ozalp) citoyens suédois, arrêtés au mois de Mai au Kurdistan Turc par les "özel tim", équipes spéciale "anti-terroristes". Ces trois activistes, connus pour leur dénonciation régulière de la violence du PKK avaient eu cette idée originale: marcher de Diyarbakir à Silopi, dernière ville occupée avant la frontière irakienne, puis passer la frontière au poste de Kara Habur (Ibrahim Qalil en Kurde). Ils ont débuté leur marche portant des vestes couvertes de slogans comme "N'entrez pas au Kurdistan Sud, vous allez énerver le Nord", "Le PKK n'est qu'un prétexte, la vraie cible est le peuple Kurde et le Kurdistan" ou encore"le Kurdsitan est le pays des Kurdes, soldats, rentrez ches vous!" et "Les Kurdes veulent se gouverner eux-mêmes"

On admire l'audace, même si l'issue ne faisait guère de doute. C'est du moins une aspiration au martyr qui n'implique pas de se faire sauter dans un marché.


Ibrahim Güçlü

Ils ont évidemment été arrêtés sans ménagement avant même le début de leur marche. L'inculpation de "propagande terroriste et collaboration avec une organisation criminelle" est un grand classique indémodable, et semble même connaître un regain de succès auprès des procureurs turcs. On admire l'ironie, puisque le même Ibrahim Güçlü avait fait l'objet en 2005 de menaces de mort du PKK, comme à vrai tout kurde assez "Cesur" (brave) pour ne pas comprendre que le peuple est unanimement derrière Apo, merde quoi, il faudra le répéter combien de fois. Il avait répondu à ces menaces du PKK dans le journal Hürriyet en Septembre 2005...Il était également signataire de la pétition "que veulent les Kurdes de Turquie" signée par des intellectuels et des hommes politiques Kurdes de Turquie et d'Europe, rendue célèbre par la signature puis le désistement de l'innénarable Leyla Zana.

On remarque le refus toujours flagrant des autorités turques pour différencier "Kurde" de "PKK" malgré les discours officiels: tout engagement pour la cause Kurde est séparatiste et terroriste, point final...et ca arrange qui tout ca??? LE PKK! On ne le répetera jamais assez...En tous cas ce n'est pas moi qui arrêterai!

Ils seront présentés la cour pénal n°4 de Diyarbakir le 8 juin...