mercredi, juin 14, 2006

UMP, MHP, même combat?

Splendide article de Martin Winckler dans Libération, rubrique "rebonds", réaction à une déclaration révélatrice de Sarkozy sur la régularisation des sans-papiers et de leurs enfants... D'après Sarkozy, un "gage d'intégration" c'est le fait de "n'avoir aucun lien avec le pays d'origine" et donc ne parlent plus leur langue maternelle...

Une problématique "intégration = assimilation" dans la grande tradition jacobine française: on ne peut être français en ayant une autre langue maternelle...arracher un enfant à sa culture, c'est en faire un français. Comment comprendre l'opposition de Sarkozy à la Turquie républicaine??? Ce modèle autiste, négationniste et délétère pour la "diversité culturelle" (concept signifiant en France qu'il faut que le français et non l'anglais domine le monde, et non une idée archaïque de défense des langues minoritaires vecteur du fascisme identitaire)

Voila quelques extraits de cet article...

Tertio : «La langue du pays d'origine» ­ c'est sur ce point que la «pensée» de Nicolas Sarkozy est la plus claire. Faire de la méconnaissance de la langue du pays d'origine (ou l'«absence de tout lien avec le pays d'origine») par les enfants nés en France une condition à la régularisation des familles, ce n'est pas seulement monstrueux, c'est aussi d'une grande perversité.

Car tout enfant d'immigrant entend ses parents parler leur langue d'origine, la comprend, et la parle lui aussi. Même s'il apprend à l'école la langue du pays d'accueil. Il ne peut pas en être autrement à moins d'interdire aux parents de parler leur langue maternelle devant leurs enfants, et de ne s'adresser à eux que dans une langue d'accueil qu'ils maîtrisent le plus souvent très mal. Et ce serait d'autant plus stupide de le faire que les enfants sont souvent en eux-mêmes le principal vecteur d'intégration des parents : parlant les deux langues ils deviennent «les interprètes» de leurs parents.

Question : si un citoyen venu d'un pays anglophone demandait l'asile politique en France en raison de persécutions exercées sur lui par le gouvernement Bush, préciserait-on comme condition que ses enfants ne parlent jamais l'anglais ? Leur interdirait-on de prendre l'anglais comme première langue dans un collège ou un lycée républicain ? Et si un enfant de réfugié chinois né en France décide d'étudier le chinois au lycée, va-t-on l'empêcher de le faire ? Jusqu'à quel âge ces enfants seront-ils privés de tout contact avec leur pays ou leur culture d'origine ? Et dans la mesure où leur premier lien avec cette culture, cette langue, ce pays est représenté par leurs parents, Monsieur Sarkozy veut-il dire que les enfants pourraient être gardés en France, mais que, pour bien faire, les parents en seraient, eux, expulsés ?

Interdire à quelqu'un de parler sa langue ou la langue de ses parents, c'est cruel et c'est barbare. Faire de l'ignorance (ou du mensonge) une condition d'intégration, c'est pervers et monstrueux. Et, en pratique, ce n'est pas seulement monstrueux, barbare et pervers. C'est aussi très, très con. Il est impossible qu'un enfant ignore ses origines culturelles ­ la langue d'origine en est non seulement le coeur mais aussi le vecteur. Et on peut se demander si Nicolas Sarkozy, qui n'hésite jamais à rappeler qu'il est lui-même issu d'une famille d'immigrés, ignore tout de la langue de ses ancêtres. En tout cas, le langage politique du ministre de l'Intérieur n'a rien de maternel. Ce n'est pas un langage, d'ailleurs. Un langage, c'est un outil de communication, d'échange, de partage, d'intelligence.

Quatre mots totalement... «étrangers» à Nicolas Sarkozy.


Bref, je bois du petit lait dès le petit-dèj...:o)



7 commentaires:

Anonyme a dit…

Que Libé dénonce une monstruosité pareille ça aide à avaler le petit déj. Mais en face de notre Sarko de choc, le discours politique reste désespéremment vide. A croire que c'est le reste de la classe politique qui pète les plombs avec lui.

des flics venus chercher des petits kurdes à l'école maternelle comme s'ils représentaient un grave danger pour les petits copains, c'était pas une "gaffe" non plus. Ca montrait comme "la France" serait intraitable sur cette question : on ne va pas se laisser emm.. par ces femmes de militaires (et tous les autres) qui trouvent que ça ne tourne pas rond au pays des droits de l'homme, quand-même! Rassurez vous "électeurs"

dispenser de charter les gamins nés et scolarisés ici (déjà ça fait pas lourd) et " ne parlant pas la langue de leurs parents" ce qui doit avoisiner le zéro, c'était pas de la simple connerie non plus. Vous restez si vous effacez qui vous êtes.

(mais il paraît que Sarko voulait montrer qu'il avait quand-même du coeur)

Tom a dit…

On alors c'est le principe d'égalité qui prévaut

"pas de raison de mieux traiter les immigrés qu'on traitait les Bretons à l'époque"...

A l'exception près qu'on ne pouvait pas nous expulser de notre pays natal, juste nous forcer à émigrer...

Anonyme a dit…

une exception de taille quand-même. Et le breton (comme le réo-mao'hi en polynésie ) était strictement interdit et humilié à à l'école. Mais on ne punissait pas les gosses parce qu'ils le parlaient avec leur mère.

La mise en place d'une école publique gratuite, laïque ( le "progrès" contre les "superstitions") obligatoire et la même pour tous, répondait à un idéal d'égalité jacobin- au détriment des libertés et de la reconnaissance des particularismes (girondin): paris contre la province.
Les débats lors son élaboration étaient chauds à l'assemblée..

On peut déplorer ses conséquences et ses excès, préférer la liberté à une égalité rigide, mais au moins l'idéal qui le portait n'était quand-même pas complètement pourri.

Je n'en dirai pas autant de celui que ce "geste de générosité" sarkozienne révèle.

Mais le problème justement c'est qu'il surfe avec cet idéal égalitaire bien français. (mais avec bien d'autres sentiments aussi)

euh les bretons forcer à émigrer à cause de leur langue...tu ne fais pas quelques raccourcis rapides, là, Tom?

Tom a dit…

Mais non forcés à émigrer du fait du refus du gouvernement français de développer le pays... je sais pas si tu connais ce mot de Pompidou:

"si les bretons veulent du travail, ils devront aller le chercher ailleurs"...

maitenant c'est plus "si les jeunes diplomés français veulent du travail, qu'ils quittent la France" ;o)


le plan français pour la Bretagne dans les années 60, c'était une réserve militaire et touristique...heureusement que ca a foiré!

En effet on ne punissait pas les gosses parce qu'ils parlaient en Breton avec leur mère, on humiliait les mères en public parce qu'elles parlaient "la langue des poules et des oies"...donc c'est les mères qui punissaient elles mêmes leurs gosses...

Anonyme a dit…

Là non plus je ne te suis pas tout à fait. La délocalisation de Citroën à Rennes par ex. s'est faite dans le cadre de mesures prises pour tenter de rééquilibrer le territoire français par rapport à Paris.
Ok, sont pas allés jusqu'à Landerneau, mais la "voie express"gratuite quand on construisait ailleurs des autoroutes payantes, si.

Cette remarque de Pompidou, en pleine période des trois glorieuses où développement économique rimait avec développement industriel, me paraît plus révélateur d'une certaine myopie. On n'imaginait pas que ça puisse être "autrement"
Et pas encore que d'autres facteurs comme la présence locale d'une "importante matière grise", le "sens des échanges (quand-même les Bretons )l'environnement etc..conjugués à une révolution des moyens de communications seraient facteur de développement.
On peut dire la même chose pour d'autres régions comme l'Ardèche, par exemple qui a attiré de nombreux "diplômés" en quête d'une autre façon de vivre, sans pour autant y élever des chèvres.

L'appréhension du problème de l'emploi des jeunes (pas seulement diplômés!) relève de la même myopie je pense. Considérer que "vitesse" et rentabilité immédiates sont des valeurs en soi par exemple. L'idée que les délocalisations sont irrémédiables par exemple. Elles ont été permises par des moyens et des infrastructures de transports devenus ultra performants (on ne voit plus de marins dans les ports marchands!!). Mais qu'ils resteraient peu onéreux, on commence à voir que c'est un leurre, que les canaux ou détroits resteraient toujours ouverts à la circulation découle de "la foi" et que les peuples seraient toujours prêts à tout sacrifier sur l 'autel du consumérisme..de l'intégrisme.
Bref, si on laisse se développer un sous-emploi des jeunes c'est parce qu'on croit que les choses sont figées. A l'ENA on apprend pas mal de choses mais c'est mal vu d'avoir de l'imagination.
On s'éloigne un peu de la langue des gosses étrangers, mais peut-être pas tant que ça.

Anonyme a dit…

Je te suis beaucoup plus sur cette histoire d'humiliation des mères bretonnantes par le monde de l'école.
C'est la même chose aujourd'hui. Une mère turque analphabète sera plus ou moins méprisée, ce qui ne sera pas le cas si elle est turque et (archi) diplômée même si elle ne parle pas un mot de français..ce sacro saint dîplome, en France sans lequel déjà tu es censé n'être pas grand-chose, si en plus tu maîtrises mal la langue, on ne te prend vraiment pas au sérieux.
Ca évidemment, les gamins le sentent. Et pour combattre ce mépris, les statégies peuvent être différentes (rejet de l'école, ou adhésion en devenant les meilleurs, comme mon grand-père et ses potes, et en compartimentant ( en évitant que leurs parents ne fréquentent l'école par ex)

Anonyme a dit…

Et dans le développement breton de l'après-guerre, tu oublies les artichauts qui ont remplacé les champs de blé dans certain coin du Finistère.
(c'était quand-même pas pour ravitailler les touristes et quelques militaires)
Honte à toi, Tom.