vendredi, mars 23, 2007

Ya-sa-sin Fran-sa Ya sev ya terket!

J'ai la chance d'observer la campagne présidentielle française dans le confort de l'expatriation volontaire, à la fois de Bretagne et de france. Cela me permet de relativiser, en me disant égoïstement qu'après tout, le résultat ne changera à rien à ma condition ni à mon avenir.


Relativiser permet de bien rigoler quotidiennement, et chaque jour apporte un trésor, une déclaration fracassante, une idée géniale.

J'avais déja noté la délicieuse tendance des anti-turcs français à reprendre mot pour mot les slogans de partis turcs douteux. Nicolas "Soitulaimesoitulaquittes" Sarkozy n'a pas encore été contacté par le MHP pour les droits d'auteur de ce charmant mot d'ordre, Ségolène Royal échappe encore aux poursuites de Necemettin Erbakan pour "l'ordre juste" (adil düzen).

La police parisienne gaze, tabasse et rafle dans Belleville avec un entrain qui laisserait admiratif (une directrice d'école maternelle en garde à vue pour "outrage et dégradation de bien public en réunion, avouez que c'est savoureux) une amicale des vétérans des özel tim des années 90 au Kurdistan Turc. Evidemment, on est encore loin des hauts faits du 16 juillet 1942 ou du 17 octobre 1961. Mais on sent que la motivation est là, que les vocations vont naitre.


Cette incompréhension des hommes politiques français envers la Turquie... Comment deux républiques unes et indivisibles ayant tenté avec plus ou moins de succès et des méthodes différentes d'assimiler leurs minorités (mais il n'y en a pas), cultivant le non paritarisme politique, s'efforçant d'écarter les petits partis de l'assemblée, peuvent elles autant se méconnaître. La France de la IIIème république, jacobine, raciste (la mission civilisatrice des races supérieures, du cher Jules Ferry), autoritaire et militariste (n'en parlez jamais, pensez y toujours, tu seras soldat mon fils) a été le modèle d'Atatürk, ce qui n'a pas été sa meilleure idée.

Aujourd'hui, c'est un juste retour des choses, les grands esprits français puisent là ou il est le plus fort un esprit cocardier anachronique. Sarkozy, dans son discours sur les croisades, aurait omis de faire une déclaration initialement prévue, sur la charte européenne des langues régionales. En substance "je ne veux pas qu'un jour un juge européen vienne imposer à la France d'enseigner des langues minoritaires à l'école". Une bonne réaction de chef d'Etat Major Turc ça! La méchante Europe, qui fait rien qu'à vouloir diviser la république unéindivisble!

Marie-Ségolène, elle , a décidé que la seule réaction qu'un parti de gauche peut avoir quand son adversaire se vautre dans le patriocardisme, la franchouillardise et "l'identité françaîîse" (mot sale et dégradant quand elle est bretonne pourtant...), c'est... de faire pareil. Après avoir soutenu les "forces démocratiques" hongroises en octobre quand les Skinheads défilaient à Budapest (ils ont remis le 15 mars, juste quand j'y étais, c'est mignon), c'est cohérent.


(Budapest, 15 mars)

Bon, ce n'est pas si méchant, mais ça nous renvoie à notre idée de départ, la turquisation de la politique française. Marie-Ségo donc, a eu une idée.

"Je pense que tous les Français devraient avoir chez eux le drapeau tricolore. Dans les autres pays, on met le drapeau aux fenêtres le jour de la fête nationale"

Oui, en Turquie par exemple, ou flottent partout les "ay yildiz" à chacune des nombreuses fête nationale (dont la "fête des forces armées", le 30 aout je crois), et ou il existe une véritable surenchère dans la taille des drapeaux, certains couvrant la moitié des facades d'immeubles de 20 étages. Ou quand des gamins kurdes brûlent un drapeau turc devant les caméras, la presse entière éructe et pleure sur la patrie en danger. Où quand une animatice de télé shoote dans un ballon de baudruche décoré du drapeau, elle est attaquée en justice, ou un militaire refuse de couper un gateau d'anniversaire décoré du même drapeau pour "ne pas diviser la nation".

On en est pas là, mais on y arrive. Après tout un député sarkozyste avait proposé une loi punissant l'outrage au drapeau et aux symboles de la nation. Il faudrait lui refiler le ministère de l'identité nationale, il pourrait nous pondre un article 301 "alafranja"...

Qu'on ne se méprenne pas, le drapeau français ne me dérange pas, il ne me fait ni chaud ni froid. Il le faut partout, chez tout le monde, pour que vive la République.

Bon chez moi désolé, j'ai pas la place


Et puis les couleurs ne vont pas ensemble, rien à faire. Je pense néanmoins être à l'abri des poursuites légales qui ne manqueront pas de s'ensuivre. Et puis la Bretagne étant "2 fois française", son drapeau ne peut que l'être non?

Un bon résumé pour finir, du blog de Claude Askolovitch

La France, ce n'est pas rien. Certes. Mais est-elle vraiment en jeu à ce point, dans cette campagne? Croit-on vraiment que Le Pen va nous le voler, notre pays? Ou joue-t-on. La France, messieurs-dames! Ils nous le disent tous, et Sarkozy qui s'en gargarise, se drape de patriotisme pour effacer ses vulgarités identitaires, et Bayrou, qui devrait mettre un bémol à son pathos populiste (sa vocation à être le "Président du peuple" m'a fait irrésistiblement penser aux communicants de Blair inventant l'expression "People's princess" à propos de Diana -allez voir the Queen si ça joue encore!). Et Royal donc. La France, la France, la France, sautons tous sur nos chaises comme des cabris! Pendant ce temps, on ne parle pas politique. Ca manque.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Ben, t'as beau l'aimer, parfois on ne te force à la quitter la douce France. Une façon de faire venir les caméras peut-être ces rafles dans les écoles maternelles? Ca passe à la TV dans nos coquettes banlieues pavilloniaires. Et il y a des électeurs potentiels que ça réconforte les méthodes musclées pour faire respecter l'ordre et la loi de la république.

Anonyme a dit…

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3214,36-886451,0.html?xtor=RSS-3214

On se demande qui inspire qui, dans tout ça. Mais migrants de l'intérieur ou de l'extérieur, si c'est le contrat social qu'on veut instauré, c'est plutôt mal barré.

à l'ouest, les clandestins, à l'Est les terroristes ..au centre les drapeaux.
Au moins la thèse des ennemis de l'intérieur a quelques vertus : il suffirait de les éradiquer pour que retrouver la paix sociale, c'est simple, ça ne coûte pas très cher, et ça fait tellement de bien à l'identité nationale de s'imaginer ça.