mardi, octobre 10, 2006

Pénaliser la bêtise

Le projet de loi socialiste pénalisant la "négation" du génocide arménien est une aberration qui risque de compromettre les rapports franco-turcs et de donner de l'eau au moulin des anti-turquie, triomphant devant d'inévitables manifestations négationnistes de turcs de France ou de Turquie.

Erdogan n'a pas tort en disant que ce problème ne regarde que la Turquie et l'Arménie: l'attitude de la France est ridicule est emprunte de mauvaise foi... que ce projet soit porté par Devedjian, qui étant d'origine arménienne se sent obligé d'être anti-turc jusqu'au racisme en dit beaucoup sur sa crédibilité. Pour lire tous les jours la presse française, je n'ai pas l'impression que le négationnisme tienne le haut du pavé, et qu'il soit nécessaire de recourir à de telles mesures de santé publique pour faire taire les rares histoiriens qui pourraient, sans contester les chiffres et la dimension du massacre, refuser d'y accoler le terme "génocide" pour préférer parler "d'épuration ethnique". Personnellement, et je ne suis pas historien, c'est ma position, oups ca y est je l'ai dit, on va m'obliger à fermer mon blog.

Cette mesure n'a pour but que de satisfaire le fameux "lobby" arménien, dominé par un parti arménien d'extrême droite le Dashnak, minoritaire en Arménie, et de pourrir au maximum les rapports entre la France et la Turquie, déja tendus par les accès de turcophobie française. "Non à la Turquie" était le seul thème de campagne de la droite souverainiste lors du réferendum sur la constitution, il sera, à en croire Semih Vaner, partie intégrante du programme de Sarkozy.

Je ne conteste pas ici le fond, et je n'ai aucune sympathie pour les négationnistes. Mais est on négationniste quand on dit "en effet il y a eu volonté de chasser ou de tuer les arméniens de l'empire ottoman (pas "de turquie"), on ne conteste pas les chiffres, mais ce n'est pas un "génocide""??? Dans ce cas je me découvre négationniste... Mais quelle classe de la part de la France, quand on voit l'état dans lequel elle est, d'envoyer des déclarations de guerre diplomatique à un pays comme la Turquie! Quel coup de couteau dans le dos des démocrates turcs, qui ont déja fort à faire sur le front intérieur! Le fait que tous ces démocrates soit francophones et francophiles n'effleure même pas François Hollande et Patrick Devedjian...

Le fait que le plus grand intellectuel arménien de Turquie, rédacteur en chef du journal arménien AGOS, Hrant Dink, parle de "Stupidité" ne les fera pas changer d'avis. Les réactions de Hrant Dink, Elif Safak, Murat Belge, Baskin Oran, sont en ligne et traduites ici.

Ces noms ne disent rien à Devedjian ou Hollande, plus occupés à compter les soutiens d'assistants de conseiller cantonnaux à telle ou telle candidature à l'investiture.

"S’il n’y avait pas d’ennemis de la liberté à l’étranger, c’est-à-dire de gens disant qu’il faut pénaliser la négation du génocide arménien, alors en Turquie les partisans de la pénalisation de la reconnaissance du génocide seraient anéantis." Baskin Oran

Le même Baskin Oran qui se bat contre une note du MGK (conseil national de sécurité) interdisant la traduction en turc moderne des archives du cadastre d'avant 1915, qui pourraient ouvrir la voie à des compensations pour les minorités chrétiennes (arméniennes, grecques, assyriennes) expropriées par l'Etat à la suite des massacres et déportations.

Baskin Oran serait il jugé en France?

Hrant Dink déclare en tous cas le concours ouvert "La Turquie et la France peuvent se battre pour savoir qui me mettra en prison le premier".

"If this bill becomes law, I will be among the first to head for France and break the law. Then we can watch both the Turkish Republic and the French government race against eachother to condemn me. We can watch to see which will throw me into jail first.....I really think that France, if it makes this bill law, will be"

Après s'être attelé à pourrir la constitution européenne, les politiques français vont maintenant studieusement pourrir la cause démocrate en Turquie et tout rapprochement entre arméniens et turcs... Mais il est vrai qu'un député des hauts de seine et un rougeaud qui n'est jamais sorti de son appareil connaissent mieux le sujet que des personnes qui se batte depuis des années pour faire progresser la Turquie sur la voie de la démocratie...


3 commentaires:

Anonyme a dit…

Mille fois d'accord. Et je m'inquiète aussi pour notre démocratie, si les politiques continuent à vouloir instaurer" une histoire officielle".
L'Union Européenne a été fondée sans qu'il ne soit exiger d' aucun de ses Etats membres de reconnaitre ses "crimes du passé". Heureusement, car c'est un confessionnal géant qu'on aurait construit au lieu d'une région où au moins règne la paix et la démocratie. Ce qui n'est quand-même pas rien et n'avait rien d'évident à l'origine.

Cette instrumentalisation de la question arménienne a quelque chose de profondément malsain.

Anonyme a dit…

Enfin qui sait, la sottise de notre classe politique permettra peut-être à court terme une véritable collaboration sans entraves et porteuse de sens entre chercheurs turcs et arméniens, en mettant has been les idéologues des 2 camps.
Quant aux notres, ils risquent bien de se retrouver les dindons de la farce dans tout ça.
bon, on pourra se consoler, il nous restera Devedjan. Et puis on peut toujours faire du neuf avec du vieux et "Occident" ce serait pas mal comme projet pour la France..

Tom a dit…

Il était à occident Devedjian??? Etonnant pour un tel humaniste :)

Je pense pas que ca favorise quoi que ce soit...mais apparemment ca va faire un flop, plein de députés trouvent ca foncièrement inutile, dans le style "on a quand meme d'autres problèmes en France!"