Ils ne vont quand même pas oser...
L'intervention turque en Irak, maintes fois annoncée, jamais réalisée, a fini par devenir une "running joke", une métaphore filée de l'entêtement des décideurs turcs à vouloir faire croire que se mettre l'UE, les Etats-Unis, les Arabes et les Kurdes à dos pouvait contribuer à leur sécurité. J'ai pour ma part toujours considéré les barissements belliqueux d'Abdullah Gül, Büyükyanit et son prédécesseur Özkok comme étant de la politique interne.
Le site israëlien DEBKA, citant des informations supposées émaner du Mossad, annonce pourtant que non seulement le Turquie va intervenir mais qu'en plus elle va le faire en partenariat avec l'Iran. PKK et PKJAK (le PKK en Iran, faisons simple) fournissent (aimablement) le prétexte à une main-mise sur les champs pétrolifères de Mossoul et Kirkuk.
Ma culture historique a de nombreuses lacunes, mais je n'arrive vraiment pas à me rappeller quand pour la dernière fois un Etat a annexé une partie d'un autre Etat Souverain à la suite d'une intervention militaire et a réussi à conserver le morceau. L'exemple d'Israël en 1967 vient à l'esprit, dans une configuration légèrement différente, mais on ne peut pas dire que ce soit une réussite flagrante. L'annexion du Koweït par Saddam (persuadé que personne n'interviendrait, et même conforté dans cette idée par son allié américain) n'a pas non plus laissé de traces dans les mémoire comme un grand coup de génie politique. Non vraiment, il me semble que l'époque soit plus aux modifications de frontières dues aux déclarations d'indépendances qu'aux grandes conquêtes mongoles.
L'armée turco-iranienne (qu'on m'arrête si je dis une bêtise, mais il me semble que ce serait un grande première depuis l'Empire Timuride) a pour elle une nette supériorité numérique et matérielle. Elle a contraire une incapacité chronique a mener une guerre propre et efficace contre des mouvements de guérillas: il faut donc prévoir, dans le scénario le plus optimiste, un exode des populations Kurdes Irakiennes hors de leurs villages pilonnés par les aviations turques et iraniennes, des bombardements chirurgicaux cramant tout dans un rayon de 20 kilomètres autour de la cible, des images de veuves et d'orphelins en boucle sur les écrans du monde entier. Les quelques milliers de combattants du PKK et du PJAK lutteront à avec l'énergie du désespoir et devraient infliger quelques pertes, avant de succomber sous le nombre, faute, cette fois, de porte de sortie.
C'était donc le scénario optimiste, celui ou les forces kurdes irakiennes laissent dévaster leur pays par des armées ennemies. Le scénario pessimiste donc ajoute à ce charmant tableau une résistance acharnée des 100 000 peshmergas des forces du gouvernement régional kurde, commandées par des généraux rompus au combat de guérilla, vétérans de la résistance contre Saddam, appuyés par la population, armés et habillés par les Etats-Unis, entraînés par des instructeurs israëliens, et ayant avec eux le bon droit, celui de la résistance à l'envahisseur. Cela signifierait pour la Turquie un abandon total du rêve européen, contre les illusoires ressources apportées par le pétrole irakien.
J'espère ne pas me tromper, mais je n'y crois pas une seconde. Evidemment personne n'aurait cru que la France, l'Angleterre et Israël envahiraient l'Egypte nasserienne en 1956 pour prendre le contrôle du canal de Suez. Victoire militaire (la belle affaire), fiasco diplomatique et humiliation, tape sur les doigts par l'Oncle Sam, menace nucléaire par l'Oncle Ivan, à méditer pour les Turcs.
Au même moment, Jalal Talabani, qui n'a pas du tout envie de voir des Turcs en uniforme au Kurdistan Sud, annonce avoir obtenu du PKK un nouveau cessez le feu, qui prendra effet dans les jours à venir. Difficile ensuite pour la Turquie, même si elle ne reconnaît jamais ces cessez-le-feu, de justifier une intervention... Difficile aussi d'expliquer aux investisseurs turcs qui injectent des millions de YTL dans l'économie kurdistanaise (quel joli mot) qu'ils vont perdre leurs billes dans une "metal firtina" (tempête de métal) des familles.
La Turquie et l'Iran surtout se sont déja signalés ces derniers mois par des bombardements des positions rebelles dans le Kandil, avec une inefficacité criante. La perspective d'une intervention terrestre semble hautement irréaliste, mais la connerie humaine n'a parfois que faire des considérations stratégiques et du bon sens.
La où l'article brouillon de DEBKA perd un peu plus de crédibilité, c'est en annonçant doctement qu'en cas d'intervention, les Turcs et les Iraniens veilleront à détruire les postes d'observations israëliens au Kurdistan Irakien, et empêcher Israël d'utiliser l'aéroport d'Erbil dans une éventuelle offensive israëlo-américaine contre l'Iran. La Turquie laïque, dans un judicieux renversement d'alliance s'allierait donc à l'Iran Chiite contre les judéos-croisés, coupant les ponts avec ses actuels alliés Américains et Israëliens, sortant de l'OTAN... Si Enver Pasa était à la tête de la Turquie, je ne dis pas. Sa grande offensive caucasienne de 1915 avait fini lamentablement dans les neiges de Kars, sans même franchir la frontière russe, ses troupes gelant sur pied sans tirer un coup de fusil, précipitant ainsi la défaite des Ottomans malgré le génie de son rival Mustafa Kémal sur le front ouest.
2 commentaires:
Ouais...Ca paraît plus de l'intox ou de la géopolitique fiction l'info de ce site.
La carte "iranienne", certes, les Turcs doivent en jouer. De là à imaginer un nouvel axe : Turquie-Iran(-Syrie-Hezbollah), hum, hum!
Et l'armée turque fera comment pour assurer la maintenance de son matériel si elle fâche à ce point l'allié américain?
Les enchères ne seraient-elles pas en train de monter alors que l'échéance du statut de Kirkouk se rapproche..et le Pkk, un simple pion dans ce jeu qui pourrait être celui de "poker menteur"??
C'est de l'intox bien sur...si les USA laissent faire un truc pareil c'est qu'ils ont également pété les plombs, ou peut être veulent pousser l'Iran à faire un faux pas pour lui tomber sur le rable...j'aime bien faire de la politique fiction moi aussi...
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